Samain ou le voyage des âmes - Samain or the Souls' Errand

Samain, un rituel celte ancestral

Samain an ancestral Celtic ritual


Vous aurez peut-être (ou peut-être pas) déjà entendu ce mot étrange, prononcé ˈsɑːwɪn/, /ˈsaʊ.ɪn/, ou /ˈsaʊn, et qui désigne une certaine cérémonie religieuse celte...

You might have already heard this weird word pronounced either ˈsɑːwɪn/, /ˈsaʊ.ɪn/, ou /ˈsaʊn, that refers to a very particular Celtic ceremony.

Samain or Samhain in Irish is the most important religious celebration for the Celts
Samhain : les animaux symboliques

Samain (Samhain en Irlande) est la plus connue des célébrations religieuses celtiques, car elle est l’ancêtre d’Halloween. Les irlandais émigrés aux Etats-Unis, emmenant avec eux leurs traditions, préalablement passées à la moulinette de la christianisation, s’intégrèrent tant bien que mal aux populations établies. Les influences multiculturelles, les mutations inéluctables des langues vivantes, rebaptisèrent Samain en « Halloween ». Le rituel lui-même fut quelque peu adapté aux conditions locales et rares sont ceux qui s’en rappellent les origines.

As the ancestor of Halloween, Samain remains the most famous Celtic celebration. The Irish emigrated to the United States, hoping for a better future, brought their traditions along with them and shared them with the populations already settled in the new country. The foreign influences as well as the natural mutation of all live languages slowly re-baptised Samain to « Halloween ». The ritual itself was fairly adapted and seldom are those who remember the original meaning of the celebration.

The sacred animals of Samain the boar and the owl - Le sanglier et le chavagneux ou hibou Grand Duc en patois auvergnat
Le sanglier et le chavagneux (hibou Grand Duc en auvergnat)

Célébrée la nuit du 31 octobre au 1er novembre, selon Lady Jane Francesca Wilde, Samain marque de manière symbolique le déclin puis la « mort » de la nature, c’est-à-dire la fin de belle saison et l’arrivée de l’hiver.

Celebrated the night of the 31 October, according to Lady Francesca Wilde, Samain symbolises the decline and death of nature that is, the end of the fair season and the arrival of winter.

The raven is the symbol of wisdom intelligence and longevity - It is also the central animal in Samuel Taylor Coleridge and Edgar Allan Poe poems both entitled The Raven
Le corbeau, le messager - The raven, the messenger

Pour le peuple celte, et contrairement à la conception populaire actuelle, cette « mort » est bénéfique, essentielle même. C’est le moment où la nature entre en repos et se régénère avant de renaître, féconde et puissante, au printemps suivant.
Samain est aussi l’unique occasion pour les âmes de voyager d’un monde à l’autre. C’est probablement de cet aspect particulier que découle la « fête des morts » chrétienne, autrement dit la Toussaint. Les celtes accordent une importance toute particulière à l’harmonie qui règne entre le monde des vivants et celui des défunts, hommes ou animaux. Si l’équilibre est rompu, si les âmes ne trouvent pas la sérénité qu’elles méritent, alors les pires cataclysmes sont à craindre…

Ces consonances animistes m’ont séduite. Elles m’ont inspiré l’œuvre ci-dessus, dénommée tout naturellement « Samain ».
La fresque illustre le voyage des âmes de mes cinq animaux fétiches, entourés des branches omnipotentes de l’arbre de vie, qui les protège et leur confère une nouvelle vie.
Peinte sur bois de hêtre, symbole de sagesse, cette huile porte la double signification de ses sujets figuratifs et des matériaux utilisés.

For the Celts, contrarily to the popular conception, this « death » is a blessing. It represents the crucial moment when nature rests and regenerates to be reborn, fertile and powerful the following spring.
Samain is also the one occasion when the souls of the departed can travel from one world to the other. The Christian’s « All Saints » celebration set on the 1st November may derive from this ancient celt’s belief. For the Celts, the harmony that reigns between the world of the living and the world of the dead, human beings as well as animals, is vital. It conditions the serenity of the year to come. Should peace not be found, then dreadful cataclysms may occur…

The animistic aspects of the event particularly seduced me. They inspired me above artistic work, which I very naturally named « Samain ».
The fresco illustrates the travel of my five sacred animals’ souls. They are surrounded by the protective branches of the Tree of Life that trusts them with deserved life.
Painted on beech wood, for it represents wisdom, this oil painting bears the double symbolism of its figurative characters and of the material itself. 

Playlist (parce que je ne conçois pas d'art sans musique ;0) : Apocalyptica "Inquisition Symphony", Epica "Design Your Universe", Gojira "L'enfant sauvage", Dagon "Terraphobic"

Ophiuchus, le treizième signe du zodiaque

Ophiuchus, le 13ème signe du zodiaque

Ophiuchus ou le serpentaire, le signe oublié du zodiaque


De la plume au pinceau, voici la constellation du serpentaire appelée également constellation d'Ophiuchus :

Huile peinte sur bois de hêtre, cuivre martelé et incrustation de pierres semi-précieuses : jade, améthyste auvergnate, quartz rose, citrine et grenat.


Il n'y a pas douze mais treize signes du zodiaque. Le serpentaire ou ophiuchus en latin se situe entre le scorpion et le sagittaire.
La constellation d'Ophiuchus dite le serpentaire ou le 13ème signe du zodiaque

Le Sagittaire, tout le monde connaît et pourtant...
Le serpentaire est le treizième signe du zodiaque
La mise en peinture
Nos ancêtres les celtes, grands observateurs du ciel et des messages portés par les étoiles, considéraient qu'entre nos constellations bien connues du Scorpion et du Sagittaire, siégeait celle d'Ophiuchus, le dompteur de serpents. Ainsi les enfants nés entre le 29 novembre et le 17 décembre, qui pensaient porter le signe du Sagittaire (c'est mon cas), seraient en fait des enfants d'Ophiuchus, c'est à dire des serpentaires...
Rien de négatif en ce serpent, toutefois, fort éloigné de celui des enfers, car il s'agit du serpent que l'on retrouve sur le caducée d'Hippocrate, symbole de la médecine.

Connue des celtes la constellation du serpentaire a aujourd'hui disparu du zodiaque
Ophiuchus, le serpentaire, huile sur bois et cuivre martelé


Son caractère ? En voici un extrait :

"Le Serpentaire cherche l’harmonie, la paix et la sagesse. Il est précis dans ses idées et dans ses gestes. Il peut endosser le rôle de justicier du fait de sa fierté, allant jusqu’à l’arrogance parfois. Il a de l'autorité, mais aime peu commander. Très humain, il adore communiquer avec autrui, transmettre ce qu'il sait, apprendre ce qu'il ignore. Tenace, le Serpentaire n'abandonne jamais une idée et va jusqu'au bout de ses plans avec une opiniâtreté inlassable. Le natif du Serpentaire estime que l'homme doit progresser par lui-même, seul et que l'on n'obtient rien sans donner quelque chose en échange. Il est orienté vers la médecine et la guérison naturelle. Le natif du Serpentaire a besoin d’avoir une grande liberté d'action. Adorant les voyages, changer de peau, avoir des personnalités multiples, il déroute souvent les autres. Refusant les liens aliénants, il préfère les liaisons temporaires dans de nombreux domaines de l'existence. Il est opposé à toute forme de contrainte ou d'oppression, ayant les ressources pour se dégager des mailles du filet dans lequel on cherche parfois a les retenir."

Cette quatrième dimension du zodiaque, ce signe caché, m'a inspiré une oeuvre, dont je vous dévoile quelques-unes des étapes de création :

Préparation des incrustations
Martelage du cuivre











Détail de la "géante rouge" au centre de l'oeuvre : cuivre martelé, réhaussé d'arabesques argentées et maillage cuivré :


La constellation du serpentaire, ou ophiuchus en latin, le 13ème signe du zodiaque
Ophiuchus ou le serpentaire, le 13ème signe du zodiaque

Playlist : Epica "The Quantum Enigma", In Flames "Colony", Amon Amarth "Jomsviking"

Contes et légendes d'Auvergne : Le papier argentin 3ème partie


Contes et légendes d’Auvergne


Le papier argentin


Les diableries d'un colporteur en Auvergne racontées au cours de la veillée d'hiver
La légende du papier argentin

3ème partie

Il est amusant de constater que cet homme qui ne possédait rien, d’autre que sa masure et son âne, ne désirait rien, d’autre que sa vie fort remplie mais paisible ma foi, se mit à couver les caprices les plus farfelus.

D’abord il trouva que sa couche était bien pauvrette et se débrouilla pour tracer, au prix de gros efforts, un semblant de lit à baldaquin, sur un tout petit bout de papier, afin d’en épargner autant d’emplacements futurs, qu’il aurait de souhaits à exaucer…
Puis il trouva que la soupe était bien clairette et se mit, tant bien que mal, à dessiner du lard et des saucisses…

Repus, reposé à souhait, puisqu’il ne concevait plus, à présent qu’il avait de l’argent, de quitter le lit avant des tierces avancées, il pensa que tout de même, il méritait de s’offrir une ferme, une vraie, digne des plus grosses métairies du canton. Il se demanda alors s’il serait plus judicieux d’acheter le travail des constructeurs avec ses sous, ou de tenter de dessiner, aussi clairement qu’il le pourrait, la demeure de ses rêves, sur le papier…

Puis la vanité lui tournant les sangs, il se sentit piqué de l’irrésistible envie d’en remontrer à ces jean-foutres de la vallée, ceux-là même qui lui jetaient railleries et crachats au visage, lorsqu’il descendait au village, deux fois l’an…

Sauf que construire une ferme de cette taille prendrait des mois, alors que le papier lui, s’acquitterait de la tâche en une seule nuit…
Il résolut donc de demander au papier le bâti, tandis qu’il chargerait les meilleurs artisans de la vallée, les plus onéreux, de lui confectionner des rideaux, des salamandres et toutes ces joliesses qui faisaient si riche. Après tout, si ces fioritures prenaient du temps, ce n’était point grave, puisqu’elles ne serviraient à rien, qu’à lui donner prétexte à promener sa fortune, sous le nez des saloperies qui l’avaient tant méprisé…

C’est là que ses délires s’emballèrent. Tout y passa : des bijoux qu’il ne porterait jamais, aux domestiques pour s’occuper de Modeste, car il se fatiguait maintenant, de lui donner son foin quotidien…

Et à mesure qu’il faisait bombance, qu’il encombrait ses armoires de soieries orientales, il se découvrit une ribambelle d’amis, de conseillers de bonnes manières, toujours prêts à lui recommander les chausses à la dernière mode, ou le bon mot, qu’il placerait lors de sa prochaine réception. Tout ce joli monde grouillait autour de lui, et même si parfois cette agitation futile et tapageuse l’agaçait, il se disait que sa vie devait à présent ressembler à celle d’un Duc et que c’était bien ainsi.

Dehors, Modeste nostalgique de sa sérénité passée, tentait de survivre à l’écart, triste et ennuyé de son maître absent.

Un soir qu’il s’était retrouvé seul, finalement soulagé que le calme revienne, Antonin méditait. Il avait devant lui un petit morceau de papier, un peu jauni, pas plus grand qu’un sou…

– Bientôt il n’en restera plus, songea-t-il. J’aurais dû me montrer plus économe… Que me valait-il de nourrir tous ces gens, quand eux me laissaient crever de faim sans sourciller, autrefois ? Ah ! La bête que je suis ! Le vaniteux !

Et pris d’un sentiment de rage, il congédia brutalement les jouisseurs qui profitaient de ses largesses.

Pendant des mois il se raconta du fond des chaumières qu’il vécut en reclus, emmailloté dans ses gilets de laine mangés aux mites, car il refusait de « gaspiller » les monceaux de bûches entassés dans sa remise. Il avait tellement restreint son train de vie, par peur de manquer, que les denrées commencèrent à se gâter, abandonnées dans les garde-mangers, les bijoux et chandeliers, tantôt lustrés et chatoyants ternirent et la poussière tomba, plongeant les souvenirs luxueux, dans un sommeil oublieux…

Un soir que l’hiver s’était installé, rude et glacé, on frappa à la porte. Antonin qui ne s’attendait plus à recevoir de visite, ni n’en souhaitait d’ailleurs, écarta précautionneusement le rideau, pour ne pas se faire voir et aperçu le colporteur, qui lui avait rendu visite l’année passée.

– Si je lui ouvre, pensa-t-il, il sera content de trouver logis et me redonnera de ce papier qui me fait tant défaut…
Ravi de sa bonne idée, il s’apprêtait à l’accueillir quand il se ravisa :
– Ah ! Mais si je lui ouvre, il voudra profiter de ma fortune, comme tous les autres et me plumera jusqu’au dernier sou ! Assurément, il aura su ma réputation au village et se sera dit quel parti il pouvait en tirer ! Ah, le traitre ! Mais Antonin n’est pas un idiot !
– Passe ton chemin ! finit-il par crier de derrière la porte. Il n’y a rien pour toi ici !

Calmement, d’une voix profonde et douce, le colporteur répondit :
– La charité t’aura donc quitté toi aussi ! Comme c’est regrettable…

Et l’homme passa son chemin.

Antonin se félicita, content d’avoir échappé au piège. Il s’endormit ce soir du sommeil du juste…
Le lendemain, il s’éveilla, frigorifié, aux petites heures du matin. Etonné de cette sensation qu’il ne connaissait plus, il se frotta vigoureusement les yeux et regarda autour de lui : plus rien, que sa vieille paillasse et sa pauvre masure au-dessus de sa tête. Tout avait disparu. Avait-il donc rêvé ? Soudain il s’écria :

– Modeste ! Nom di Diou !

            Il sortit comme un fou et courut à l’emplacement, où il se souvenait avoir vu son âne pour la dernière fois. La bride, usée comme tout le reste, pendait à terre, sans point d’âne à l’autre bout…

– Mon Dieu qu’ai-je fait ? Dans ma vanité, ma stupidité, j’ai laissé crever mon âne… mon seul ami… Me voilà bien malheureux à présent ! Ah, comme j’aurais aimé ne jamais connaître ce maudit papier !!

A ces mots le colporteur surgit d’un buisson :
– Crois-tu vraiment ce que tu dis ?

            Antonin, surpris et incrédule répliqua :
– Je vous avais dit que ces choses n’étaient pas pour moi, que je ne voulais pas y toucher à vot’ papier, qu’il était pas fait pour moi !
– Peut-être, cependant c’est toi et toi seul, qui as dessiné dessus…
– Sans doute et je suis bien puni de l’avoir fait ! Comme je regrette d’avoir été si bête et si méchant !
– Pourtant il existe une solution…

            Intrigué le paysan tendit l’oreille :
– Laquelle ? Ne me faites pas languir ! Ah, que ne donnerais-je point pour que tout redevienne comme avant !
– C’est bien là la question… Que serais-tu prêt à donner ?

            « Donner », oh, comme il n’aimait plus ce mot !
  Bah dame ! Quèque vous demandez ?
– Oh, mais je ne demande rien. Je ne demande jamais rien, en fait. Il me suffit de laisser parler la concupiscence des gens, ajouta-t-il pour lui-même, leur mesquinerie, leur jalousie, tous ces charmants défauts, si utiles à ma cause…
– Mais alors quoi ?
– C’est bien simple, il te suffit de dessiner ton âne, sur ce bout de papier qu’il te reste, avec ton sang…
– Jamais ! Jamais je ne toucherai de nouveau à ce papier de malheur !
– Comme tu voudras, conclut simplement le marchand, qui disparut en trois enjambées, persuadé que le paysan le rappellerait bientôt.

            Triste et dépité, Antonin regagna le logis. Assis sur son banc, il tira machinalement de sa poche le petit bout de papier qui y était resté et le jeta aussitôt avec horreur dans le feu.
            Le ventre vide il se coucha ce soir-là :

– A quoi bon lutter ? se dit-il, maintenant que je ne serai plus heureux…

            Le matin suivant, le brouillard s’était levé. La montagne était belle sous le soleil et Antonin se remit au travail. Les anciennes habitudes ont la dent dure et c’est bien ainsi. Alors qu’il ramassait des genêts pour réparer son toit, il crut entendre un hennissement.

– Voilà que je deviens fou à présent : je crois entend’ mon âne !   

            De nouveau le hennissement. Cette fois Antonin leva le nez des fourrés : en contre-bas un âne, un âne qui lui avait tant manqué trottinait…

 – Grand Dieu, Modeste ! C’est-y qu’ce serait toi ?
           
            Et comme s’il comprenait, l’âne hocha la tête. Dès lors, tous les colporteurs du monde pourraient bien se présenter, il jura à Modeste, son unique et véritable ami, que jamais, au grand jamais, il ne toucherait encore une quelconque de leurs marchandises et aussi, qu’il y regarderait à deux fois, avant d’inviter un inconnu en son logis.

  Charité bien ordonnée…commence par soi-même ! conclut-il.

Par quel miracle Modeste avait-il survécu ? Au fond cela n’avait guère d’importance. Aujourd’hui ils étaient ensemble. Et c’était bien ainsi.

En vérité, fatigué du remue-ménage, Modeste avait consciencieusement rongé sa corde et s’était refugié dans une grange abandonnée, sur l’autre versant de la montagne. Une grange providentielle, où il restait suffisamment de foin, pour nourrir un modeste âne…

Fin